NOTRE LIGNE
« Après les brutalités des services d’ordre du 1er mai 1919, qui avaient fait deux morts parmi les manifestants, Paul RIGAIL, Gardien de la Paix, fit voter par ses camarades un ordre du jour de réprobation. Le 3 mai suivant, la « Fédération des amicales » adoptait une motion dénonçant les bavures, menaçant d’exclusion de ses rangs tout coupable de violence et exigeant une application stricte et mesurée du métier de gardien de la paix publique. »
Ce fait évoqué par Michel BERGES, Historien, est l’un des éléments fondateurs de la Police Républicaine.
La Police Républicaine ne cautionne pas les violences illégitimes, le racisme et combat ouvertement le fascisme. Elle est garante d’une « application stricte et mesurée du métier » de Gardien de la Paix.
Cinq ans après les faits ci-dessus évoqués et relatifs à des excès de forces de sécurité ayant été constatés lors d’opérations de Maintien de l’Ordre, Paul RIGAIL , sur la base de ses valeurs fondatrices, crée en 1924, le Syndicat Général de la Police (SGP).
Depuis plusieurs années, les principaux partenaires sociaux semblent hélas avoir totalement abandonné le combat Républicain au sein de la profession. Face à cette situation, un Collectif constitué par des anciens militants du SGP a été constitué en 2018.
Son but n’est pas de se muer en un nouveau syndicat, mais de pérenniser le combat du SGP, de faire vivre et entendre la Police Républicaine.
Des auteurs et journalistes participent à ce Collectif qui regroupe des policiers de toutes obédiences syndicales (exception faite de celles d’extrême droite) et se veut ouvert, au-delà du Monde Policier au Monde associatif et à tout citoyen attaché aux valeurs Républicaines.
Son positionnement est en adéquation avec les valeurs fondatrices du syndicalisme policier Républicain.
Ainsi, une tribune publiée dans le JDD après les violences illégitimes constatées lors des manifestations « Gilets Jaunes » et contre la réforme des retraites, laquelle fut imposée par un déni de démocratie demandera l’institution d’une nouvelle doctrine de Maintien de l’Ordre et la fin de l’utilisation d’armes et de munitions de guerre.
Le Collectif publie aussi, toujours dans la droite ligne des valeurs du SGP, un communiqué au moment des récentes élections législatives
Dans le journal « L’humanité » invitant les Policiers à faire barrage à l’extrême droite et à ne pas se laisser duper par « l’appel du vide ».
De même, le Collectif Police République et Citoyenneté aujourd’hui association, travaille en permanence sur de nouvelles pistes ou propositions tendant d’une part à combattre
l’insécurité, mais aussi à engager une véritable révolution culturelle au sein de la Police Nationale. sein de la Police Nationale. Les soixante propositions figurant en annexe du dernier livre de Jean Louis ARAJOL, ancien Secrétaire Général du SGP et de la FASP « Insécurité : Etat d’Urgence ! Manifeste pour une Police Républicaine » écrit à l’occasion du centenaire de la création de cette organisation, seront soumises au débat public. Un débat argumenté dans la droite ligne de notre ligne politique et le respect de tous. Un débat, un échange, une production d’idées qui permettront, nous l’espérons, d’aboutir d’ici quelques mois à l’établissement d’un véritable projet Républicain et alternatif pour l’Institution.
Ainsi, chaque Citoyen, policier ou pas, s’il le souhaite, peut demander à rejoindre ce Collectif et proposer sa contribution, apporter sa pierre au débat. Et ce, dans une période que Jean Louis ARAJOL nomme « l’ère des reniements », période que le philosophe Alain DENEAULT qualifie pour sa part de médiocratie.
La Police Nationale Française a depuis toujours compté dans ses rangs des Policiers qui ont défendu les principes et les valeurs de la République. Notre ambition est donc de pérenniser ce combat militant.
01
Toute crise sociale est subie doublement par le Policier.
A titre professionnel, il est confronté en permanence aux conséquences de cette dernière. A titre privé, il n’y échappe pas plus qu’un autre citoyen « ordinaire ». Cette situation explique entre autres le malaise que traverse en ce moment cette profession en mal de reconnaissance au sein de laquelle une véritable réforme de fond, identique à celles de Pierre Joxe ( Loi de modernisation du 7 août 1985) puis celle de Charles Pasqua (Loi d’Orientation et de Programmation du 21 Janvier 1995) est aujourd’hui et à nouveau indispensable.
Les politiques publiques qui se sont depuis succédées ont opté pour un autre système sécuritaire : Un modèle à l’Américaine , généré sur la base économique et idéologique d’un désengagement progressif de l’Etat dans l’un de ses domaines régaliens, ce qui a pour corolaires la multiplication des Polices territoriales et privées.
02
Contre une sécurité à plusieurs vitesses : la défense du principe d’égalité.
Ce modèle à l’Américaine impose de facto une sécurité à plusieurs vitesses. Le Citoyen paie un impôt pour sa sécurité. En contre partie il doit bénéficier d’un véritable Service Public. Lorsqu’un élu local, de par la déficience de l’Etat, crée une Police Municipale ou Territoriale, c’est encore le Citoyen qui va devoir assumer la charge financière considérable générée par cette nouvelle Police. Et si les citoyens les plus favorisés pourront se payer de bonnes assurances, des résidences ultra sécurisées, ou des Polices Privées au service de leur intérêt particulier, la grande majorité d’entre eux subiront de plein fouet et par voie de conséquence l’insécurité sur leur « territoire perdu de la République ».
Ces « zones de non Droit » d’hier devenues aujourd’hui « zones d’un autre Droit » sont la résultante de la désertion de l’ensemble des Services Publics sur notre territoire.
Les forces de l’ordre ne peuvent à elle seules régler l’insécurité sociale générée par la paupérisation de l’ensemble du Service Public.
La politique ultra libérale au coup par coup du saupoudrage, du court terme et –ou- électoraliste n’a pour but que de calmer provisoirement la grogne sociale au sein de la société et de la profession. Un cautère sur une jambe de bois qui induit de déshabiller Paul pour habiller Pierre, de mutualiser, d’imposer le principe législatif de « performance » (Loi de 2011), d’ évaluer les fonctionnaires sur la quantité du travail et non la qualité du travail qu’ils fournissent, d’induire ainsi trop souvent un management inhumain ou l’age
03
Les dangers du concept « productiviste » et « illibéral »
En outre, ce concept « productiviste » de « rendement » imposé à la profession ne fait que crisper toujours plus les relations entre la Police et la Population, la Police et la Jeunesse. Il implique irrémédiablement une multiplication des tensions et une dérive excessivement répressive totalement inefficace. Ce genre de dérive tout comme la dérive laxiste dont on parle moins (« Il est interdit d’interdire ») conduisent toutes deux à l’échec (« Mais que fait la police ? » 1995 Les deux dérives Jean Louis ARAJOL).
En matière de sécurité, comme dans bien d’autres domaines, c’est le juste milieu qui doit prévaloir.
Ce système ultra libéral nous conduit à l’Anarchie et au Chaos. Le Communautarisme, l’ intégrisme sous toutes ces formes, l’auto-défense, la multiplication des polices, des armes et des milices ont conduit les U.S.A. au bord de la guerre civile. Nous récusons ce Système.
04
« Quand tout sera privé, nous serons privés de tout » !
Les membres du Collectif P.R.C. , citoyens policiers, solidaires, font leur ce slogan , révélateur d’une prise de conscience collective, dans les manifestations contre la réforme des retraites ou en défense de l’Hôpital public, à l’hiver 2019.2020 .
Police, République et Citoyenneté milite pour qu’un autre modèle soit concrètement initié : le modèle Républicain.
Après la seconde guerre Mondiale, tout a été mis en œuvre pour reconstruire la République Fraternelle à laquelle aspiraient les Résistants. Les accords de « Bretton Woods », signés le 22 Juillet 1944 par quarante quatre Nations alliées aboutissent à la fameuse « Déclaration de Philadelphie ». Son texte fondateur affirme que «les être humains, quels que soient leur race, leur croyance ou leur sexe, ont le droit de poursuivre leur progrès matériel et leur développement spirituel dans la liberté et la dignité, dans la sécurité économique et avec des chances égales. La réalisation des conditions permettant d’aboutir à ce résultat doit constituer le but central de toute politique nationale et internationale. »
Adopté dans la clandestinité à peine deux mois plus tôt en France, le programme du Conseil National de la Résistance, « les jours heureux » appelle de ses vœux « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières »
Une loi de nationalisation de l’électricité et du gaz est votée le 8 Avril 1946. donnant alors naissance à deux Services Publics de grande importance.
L’ère du Service Public institué pour l’intérêt général égalitaire et non l’intérêt particulier inégalitaire vient de naître !
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Privilégier le Service Public et les libertés fondamentales
C’est donc au modèle Républicain que notre association est viscéralement attachée. Comme l’étaient les militants résistants du S.G.P ( Syndicat Général de la Police). Une organisation syndicale qui fut la première dans la Police, créée donc en 1924 par un Gardien de la Paix, Paul RIGAIL. Une organisation dont les militants furent torturés, déportés, dont les biens furent confisqués et qui fut dissoute par les fascistes.
La Police Nationale est née par le décret du 14 août 1941. Auparavant, seules existaient les polices municipales. Les trois premières années de son existence ont été corrompues par sa collaboration organique avec les occupants allemands et les services nazis tels que la Gestapo ou le « SD », le service de renseignement de la « SS ». René Bousquet puis Joseph Darnand, chef milicien, la dirigèrent successivement.
Face à cette collusion avec l’occupant nazi, de nombreux policiers, en particulier au S.G.P porte étendard historique de la Police Républicaine, réagirent soit en « traînant les pieds », soit plus radicalement en s’organisant au sein de réseaux de résistance. Le manque de zèle et d’engagement fut notable lors de la rafle parisienne des juifs étrangers, dite du Vel d’Hiv, en juillet 1942. Une douzaine de milliers de personnes furent arrêtées alors que le fichier rassemblait plus de vingt-trois mille noms… ! Informations préalables, refus d’enfoncer les portes, délais d’une heure « pour faire les bagages » en laissant les interpellés sans surveillance, toutes ces actions individuelles de policiers ont réduit l’impact de cette entreprise ignoble et le nombre des futurs déportés.
Dissous par les nazis dès l’été 1940, le S.G.P était le syndicat historique du corps des gardiens de la paix parisiens (Paris et la petite couronne). Dès sa création, en 1924 le S.G.P s’est battu pour la dignité des personnels de base de la Préfecture. Le S.G.P comprenait beaucoup de républicains, souvent francs-maçons et de toute obédiences politiques (Gaullistes, radicaux, socialistes et communistes)
L’un des principaux groupes de résistants au sein de la Préfecture de la Police se dénommait « Front National Police » Cette organisation était très proche du PCF. Elle était dirigée par un cheminot Arthur AIRAUD.
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Indépendance à l’égard des partis politiques
Cet esprit rassembleur et combattant de la résistance est celui qui a bercé durant toute son Histoire Syndicale le S.G.P qui était dans sa diversité viscéralement attaché à un principe : l’indépendance à l’égard des partis politiques. C’est cet esprit Républicain et ce principe qui animent toujours les membres du Collectif Police République Citoyenneté, créé en 2018, désormais structuré au niveau national et devenu une association.
Ce réservoir syndical historique du SGP a formé la base du mouvement républicain dans l’institution policière lors des années d’occupation. De manière incontestable, ce sont ces militants syndicaux d’avant-guerre qui assureront le caractère de masse de l’insurrection de la Préfecture de police de Paris en août 1944
De la Libération aux années de la guerre d’Algérie, être « policier républicain » signifiait donc et d’abord être « policier antifasciste ».
C’est dans ce contexte que naquirent les C.R.S. Créées le 8 décembre 1944, les Compagnies Républicaines de Sécurité formèrent un corps spécialisé au sein de la Police Nationale. Leur domaine d’intervention fut et reste encore aujourd’hui le maintien ou le rétablissement de l’Ordre public. Il s’agissait bien à l’époque de nommer ces compagnies « républicaines » pour affirmer leur nature antifasciste, alors même que le territoire national n’était pas totalement libéré et que la victoire définitive était loin d’être acquise. Les C.R.S. intégrèrent jusqu’en 1947 un nombre très important d’anciens maquisards et d’anciens résistants FTP.
Toutefois, le rapport de force favorable au courant républicain et antifasciste ne perdura pas longtemps. Dès 1947, la guerre froide et le ralliement de la France au camp occidental pro-américain eurent pour conséquence un revirement complet dans la police nationale. Beaucoup d’anciens policiers collaborateurs… et donc anticommunistes acharnés, furent réintégrés. Par contre, de nombreux policiers suspectés de sympathie communisante furent « placardisés », voire carrément suspendus à la fin des années 40 et tout au long des années 50. Le temps de la Libération était loin et les éléments réactionnaires et d’extrême droite reprenaient le haut du pavé. Cette présence de sympathisants néo-fascistes et racistes dans la police fut un élément qui explique la violence contre les « Nord-Africains », en particulier à Paris, tout au long des années 50 et bien sûr pendant la guerre d’Algérie.
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Contre le racisme et l’antisémitisme
Lors des manifestations parisiennes, les militants d’origine arabe étaient particulièrement visés. Ce fut le cas en 1952 au cours de la protestation contre la venue du général américain RIDGWAY , lorsque l’ouvrier communiste Hocine BELAID fut tué par balle.
Plus meurtrière fut l’année suivante, sept militants nationalistes algériens furent abattus par la police parisienne sur la place de la Nation, le 14 juillet 1953, lors du défilé du Parti communiste, qui se rassemblait comme chaque année depuis 1936 pour célébrer les « Valeurs républicaines ».
Il est encore plus révélateur de noter que lors de cette sanglante manifestation une cinquantaine de militants furent également blessés par balles. Des centaines de coups de feu furent tirés ce jour-là à la Nation. Il semble bien que la hiérarchie n’avait donné aucun ordre : la fusillade aurait été totalement spontanée. Ces faits prouvent le climat délétère qui règne dans les rangs policiers à cette époque.
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L’histoire éternue : organiser la résistance s’impose
L’histoire éternue …Les policiers républicains gardaient dans les années 50 un point fort, le syndicat SGP, dirigé par François Rouve. Mais le syndicat était sur la défensive. En fait, il subissait l’offensive des éléments d’extrême-droite dans les services. En restant timoré dans la dénonciation des exactions des fascistes dans la police, le poids des partisans des droits de l’Homme dans l’institution a été fort affaibli. Le fait de n’intervenir que sur le « catégoriel », en particulier sur les primes liées aux conditions de travail par rapport à la guerre d’Algérie, et pas sur la réalité de la violence policière, explique le dérapage de la manifestation syndicale du 13 mars 1958… deux mois avant le célèbre 13 mai de la même année !
Revenons un instant sur l’enchaînement des événements en ce début 1958. Depuis deux mois, le SGP organisait un mouvement catégoriel pour les primes évoquées plus haut. Un premier meeting à la salle Wagram rassembla le 7 mars trois mille policiers. Il fut alors décidé de réunir le maximum de policiers parisiens le 13, dans la cour d’honneur de la Préfecture.
Le jour dit, la maîtrise des événements échappa totalement au syndicat. Une manifestation de plusieurs milliers de gardiens de la paix sortit de la Préfecture, des « gros bras » fascistes propulsèrent ROUVE, le secrétaire général du SGP, à la tête du cortège qui se dirigea vers la Chambre des députés. Devant les grilles de l’assemblée, les gardes mobiles de la gendarmerie refusant de les disperser, les slogans antiparlementaires et antisémites fusèrent de la manifestation. Partie d’une mobilisation syndicale, cette action tourna à un coup de force anti-républicain… qui annonça la mort de la IVe République. Mais surtout, ces événements démontrèrent la fragilité du courant républicain dans la police à ce moment, à force de compromission et de non-dit sur les violences policières. François ROUVE et les responsables du SGP furent pris en otage par la base fascisante de la profession. Une base qu’ils ne maîtrisaient plus !
Bien sûr à partir de novembre 1954, la guerre d’Algérie porta l’opposition entre policiers et militants du FLN à son paroxysme. La répression fut d’une rare violence, en particulier dans les communes de la petite couronne parisienne. Tabassages systématiques par des « comités d’accueil » dans les commissariats, disparition d’interpellés retrouvés morts dans des terrains vagues, la violence fut permanente dans les quartiers populaires à forte population d’origine algérienne. C’est ce qui explique l’enchaînement tragique lors de la fin des années 50 et du début des années 60. En riposte aux violences et aux crimes policiers, la fédération de France du FLN décida d’organiser une campagne terroriste contre la police. Près de 70 gardiens de la paix furent tués en région parisienne de 1956 à 1961. La haine et la vengeance devinrent les seules règles, bien loin des procédures légales et républicaines.
Ce climat explique en partie la tuerie de masse du 17 octobre 1961 où des centaines de manifestants du FLN furent noyés, pendus ou battus à mort, y compris dans la cour même de la Préfecture de police de Paris. Il s’agit du plus grand massacre dans la capitale depuis la Saint-Barthélémy.
Le SGP ne dénonça pas le massacre du 17 octobre 61… certainement en raison d’une trop grande implication de la base policière dans cette tragédie. Seule une « tribune anonyme » de policiers républicains, pour l’essentiel d’anciens policiers résistants communistes, sauva l’honneur. En revanche, le syndicat policier fut très clair sur la tuerie du métro Charonne quelques mois plus tard, ce qui valut à son secrétaire général, Jean CHAUNAC d’être suspendu plusieurs années.
Ce positionnement républicain ainsi que le combat contre l’OAS renforcèrent le syndicat.
Cette clarification permit également de « faire le ménage » à l’intérieur de l’organisation syndicale et d’éliminer politiquement les éléments douteux et fascisants proche de « l’Algérie française ».
De 1962 à 1968, la déroute politique de l’extrême-droite et la sortie de la France du commandement intégré de l’OTAN par de Gaulle firent évoluer les rapports de force dans la police. Par exemple, l’implication de policiers véreux dans l’affaire Ben Barka en 1965 – l’enlèvement et le meurtre de l’opposant marocain – provoqua de nouvelles épurations, en particulier à la DST et dans les Renseignements généraux parisiens (RGPP).
Bref, pour faire carrière dans l’institution dans les années 60, il fallait être gaulliste mais certainement pas fasciste, ni pro-américain. Et finalement, le pouvoir gaulliste se satisfaisait également d’un syndicat, certes de gauche avec des communistes nombreux en son sein, mais au moins républicain ! Cette situation particulière est importante à comprendre pour analyser celle de 1968 et de la décennie suivante. Ainsi, contrairement à l’Italie, il n’y aura pas en France de « stratégie de la tension » déstabilisante pour la démocratie et organisée par la police et les services secrets de ce pays : les fascistes dans l’institution étaient « sous contrôle » et n’obéissaient pas à des services étrangers tels que la CIA.
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L’apaisement et la négociation plutôt que l’affrontement «police population»
L’apaisement et la négociation plutôt que l’affrontement « police population » :
Mai-68 justement marqua le début d’une période positive pour les républicains dans la police. Un heureux et pur hasard fit que le préfet Papon quitta son poste de Préfet de police de Paris fin 1966. Il fut le donneur d’ordre du massacre du 17 octobre 1961 et sera plus tard condamné pour complicité de crime contre l’humanité pour son action pendant l’Occupation. *
Le triste personnage fut remplacé, par chance, par un fonctionnaire, Maurice GRIMAUD, issu de la gauche et profondément républicain. Avec le secrétaire général du SGP, Gérard MONATE , ils formèrent un tandem qui permit d’éviter le pire, en tout cas à Paris, lors des manifestations de mai et juin. Ce ne fut pas une tâche facile car le personnel policier était globalement le même que lors de la guerre d’Algérie, conservant ses pratiques brutales de maintien de l’ordre. Il faut dire pour la petite histoire qu’un des propres fils du préfet était lui-même de « l’autre côté de la barricade » ! Pour les syndicats, le bénéfice politique fut important car le comportement policier, pour une fois « modéré », dans la répression du mouvement améliora l’image de marque de la police et permit de l’intégrer au débat républicain. Le fait que le SGP ait diffusé un tract où il regrettait l’opposition entre policiers et manifestants eut une grande importance politique. C’était la première fois qu’une organisation syndicale policière s’était montrée pratiquement aux côtés d’un mouvement social.
Bref, la police était enfin considérée à nouveau, grâce au SGP « civilisée ». Poussé par ce renouveau, en 1969, Gérard MONATE créa autour du SGP historique la Fédération Autonome des Syndicats de Police (FASP). Celle-ci regroupait au sein d’une fédération syndicale unique de la profession l’ensemble des corps policiers de toute la France. Le poids de cette organisation fut énorme au cours des années suivantes et pendant près d’un quart de siècle : on parla même de « cogestion » de l’institution entre l’État et la puissance syndicale.
Un autre élément est à prendre en considération : pour chercher à entamer le pouvoir de la FASP, les différents gouvernements de droite sous Pompidou et Giscard vont, jusqu’en 1981, favoriser l’émergence d’un syndicalisme purement « catégoriel », proche des idées réactionnaires, pour affaiblir le SGP. Paradoxalement, la conséquence fut positive pour le courant républicain dans la police. En effet, d’un syndicat unique, forcément très catégoriel et prudent sur les questions politiques et sociales, on passait à un syndicalisme « engagé » en phase avec le renouveau du combat social des années de l’après Mai 68. De plus, un vaste recrutement de fonctionnaires à partir de 1970 fit monter une nouvelle génération de jeunes policiers, qui n’étaient pas indifférents aux mouvements de la jeunesse alors en pleine effervescence. Une nouvelle génération syndicale républicaine était en train de naître.
Progressivement, la FASP fut intégrée au mouvement social au cours des années 70 et ses interventions sur le sujet des droits de l’Homme et du citoyen se firent de plus en plus régulières. L’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, après 23 ans d’opposition, engendra une politisation partisane du syndicat. Progressivement, il devint une sorte de succursale du Parti socialiste au pouvoir. Cela n’empêcha pas de réelles avancées républicaines sous les ministères de Gaston Defferre puis de Pierre Joxe.
En se politisant sous le secrétariat général de Bernard DELEPLACE, la FASP subit elle aussi la profonde crise des valeurs de la social-démocratie à partir du milieu des années 80. La déconstruction de l’Union de la gauche et le soutien à une politique de plus en plus libérale sur le plan économique sous la présidence de François Mitterrand entraînèrent une dilution du combat syndical au niveau global dans la société française, mais également dans l’institution policière.
Cela est une des raisons expliquant a contrario la tentative de redressement des secrétaires généraux Richard GERBAUDI et Jean-Louis ARAJOL sur des bases non partisanes mais essentiellement républicaines au cours des années 90. Il était problématique d’apparaître comme une courroie de transmission du gouvernement. Il s’agissait en fait d’une crise idéologique globale à gauche : un groupe assez important de syndicalistes policiers a estimé que seul un rassemblement sur les bases des valeurs et principes républicains pouvait éviter une descente aux enfers des idéaux progressistes dans la police nationale. Ce fut à cette époque également qu’émergea au sein du SGP et de la FASP, le concept de « Service Public Police », c’est-à-dire une police au service des citoyens, et non au service d’un État illégitime contre le citoyen.
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Politique politicienne et lutte contre l’insécurité ne font pas bon ménage.
Or, dès le début des années 2000, le thème de la sécurité devint un enjeu électoral d’une importance énorme. La réélection de Jacques Chirac en 2002 se fit sur ce sujet. À l’issue du scrutin, Nicolas Sarkozy s’installe place Beauvau – qu’il utilise pour traverser la rue et se retrouver à l’Élysée en 2007. L’utilisation de la sécurité publique comme rampe de lancement pour la magistrature suprême fut une catastrophe pour les valeurs et principes républicains : fermeture de petits postes, fin de la police de proximité, réforme des RG, chute d’effectifs…furent la règle pendant trois ans et aboutirent à l’explosion des banlieues en 2005.
Pendant plus d’un mois, une sorte de guerre civile de basse intensité se développa dans toute la France. Le poids encore important des syndicats républicains contribua pour partie à éviter le pire. Contrairement au mouvement des « gilets jaunes », peu de blessés graves furent à déplorer. L’utilisation des « armes non létales », comme les flash-ball ou les grenades de désenclavement fut très modérée… alors même que des coups de feu étaient tirés pratiquement tous les soirs contre les escadrons de gendarmes mobiles ou les pelotons de CRS. Notons enfin que cet épisode se termina par une défaite en rase campagne : la circulaire de Claude Guéant, secrétaire général du ministère de l’Intérieur, fait évacuer la Police des quartiers sensibles pour faire baisser la pression au plus vite et permettre l’élection de Sarkozy deux ans plus tard… malgré son fiasco total en termes de sûreté publique !
Certaines banlieues devinrent, encore plus qu’avant, des « territoires perdus de la République ».
La dernière période, celle des années 2010, fut marquée par un recul important des républicains dans la police, en particulier dans le mouvement syndical.
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La Police Républicaine : Une garantie Citoyenne
Progressivement, les organisations syndicales se lancèrent dans une surenchère corporatiste, refusant tous « les sujets qui fâchent » dans les commissariats et les services. Notons que le positionnement des représentants syndicaux aux conseils de discipline changea fondamentalement. Ces conseils sont d’une importance extrême pour maintenir une déontologie lors des interventions policières quotidiennes et pour le comportement des fonctionnaires en maintien de l’ordre.
Historiquement, les représentants du SGP se montraient la plupart du temps parfois plus sévères que l’administration pour sanctionner les « fautes lourdes » d’une minorité de fonctionnaires.
Or, tout changea dans la dernière période. Les représentants syndicaux devinrent systématiquement les « avocats » des fonctionnaires mis en cause, en particulier sur des dossiers de violences illégitimes ou des propos racistes. D’un syndicalisme républicain, soucieux des rapports « Police-Citoyen », l’on passa à un syndicalisme corporatiste à l’américaine, pour lequel importait la seule défense du corps policier. Pourrait-on imaginer aujourd’hui une condamnation comme celle de Bernard Deleplace, secrétaire de la FASP, déplorant le comportement violent des brigades motorisées lors de l’affaire Malik Oussekine en 1986 ?
Cette évolution corporatiste a affaibli les capacités de riposte des républicains dans l’institution, alors même que l’intensité de la lutte sociale s’intensifiait tout au long des années 2010 pour aboutir à l’explosion du mouvement des « gilets jaunes ».
Contrairement à l’explosion des banlieues en 2005, le « mouvement de l’occupation des ronds-points » fut réprimé avec une violence extrême selon les normes d’un pays occidental. On releva des centaines de blessés graves, souvent estropiés. Beaucoup de femmes furent victimes de violence, ce qui est assez inexplicable car elles sont peu présentes lors des confrontations violentes. Les événements prirent une telle tournure que, pour la première fois de l’histoire, un préfet de police de Paris, Michel Delpuech, homme de droite et républicain, décida que « trop c’était trop » et passa la main…en pleine crise de maintien de l’ordre.
Or aucun soutien sérieux ne vint de l’intérieur de la police. Aucun syndicat important ne dénonça l’usage immodéré des flash ball ou des grenades de désenclavement. Il s’agit là d’une défaite stratégique des républicains dans la police. Une défaite, une désertion qui, depuis, n’a fait qu’alimenter le racisme « anti flics » primaire.
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Contre l’achat des consciences une Police libre et Citoyenne
Ensuite, malgré la « mise sous cloche » liée à la pandémie du Covid-19, l’intensité de la crise économique et sociale s’aggrav . Depuis le 17 novembre 2018, date du début du mouvement des « gilets jaunes », la tension est permanente et les policiers apparaissent de plus en plus comme une sorte de garde prétorienne du pouvoir. Il faut dire que les primes des personnels qui parfois bonifient leurs revenus mensuels accréditent l’idée d’un « achat des consciences » ! Mais beaucoup de fonctionnaires de police déplorent, à juste titre cette situation qui risque de les couper définitivement du peuple dont ils sont issus. Car la crise, en s’accentuant, va durcir encore et encore les confrontations lors des manifestations à venir.
Soyons objectif, le courant politique républicain est aujourd’hui à l’étiage dans l’institution. Il faut donc presque tout reconstruire en commençant par la base, c’est-à-dire par la simple expression d’une position politique.
La première tâche est donc tout simplement de prendre la parole… ce qui est aujourd’hui l’exception. Les policiers républicains doivent s’exprimer haut et fort pour se rassembler demain. Ils constateront vite qu’ils ne sont pas si isolés dans les commissariats ! Certes, l’hégémonie idéologique est à droite, voire à l’extrême-droite, parfois inconsciemment, dans certains services et même, plus grave encore, chez bon nombre de permanents syndicaux.
Mais beaucoup de fonctionnaires ont désapprouvé la répression « à tout va », en particulier lors du « mouvement des retraites » fin 2019. Et l’affrontement de rue avec les pompiers a fait réfléchir nombre de policiers qui n’ont pas que les primes de maintien de l’ordre comme seul horizon professionnel.
Le grand succès de notre première tribune de PRC largement diffusée sur les réseaux sociaux et le JDD à ce moment là, l’appel à une refondation républicaine au sein de la Police diffusé en décembre 2018 dans l’hebdomadaire « Marianne » ont démontré que la résistance existait et était en train de s’organiser.
Oui, l’Histoire éternue et il y a des points communs entre la situation d’aujourd’hui et celle des années 50 avec la guerre d’Algérie. Il faut garder à l’esprit que, lors de situations de crise, les rapports de force peuvent également s’inverser très vite.
Rien n’est perdu à partir du moment où le courage de prendre position pour le mouvement social, comme viennent de le faire encore récemment PRC et le SNUIPN (nouveau syndicat de la FSU intérieur) existera chez les policiers.
Car, d’un point de vue objectif, toutes les conditions sont réunies pour connaître demain un nouveau « moment républicain » dans cette institution.
Voilà quelle est notre ambition
PRC n’est pas un syndicat et réfute toute polémique syndicale en son sein. Nous tentons d’éclairer au mieux les organisations syndicales et les jeunes militants sur le chemin à suivre. Nous faisons tout et ferons tout, comme le fit toujours le SGP dans don Histoire qui honore notre profession pour faire barrage à la peste brune, au racisme et au fascisme au sein de notre Institution.
A ce titre, nous prendrons les dispositions et les initiatives qui s’imposent. Nous louerons et partagerons toutes les prises de position ou manifestations républicaines, comme nous dénoncerons avec rigueur toute forme de déviance indigne du sacrifice de nos anciens.
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